Pour certains, le voyage est un passe-temps ; pour d’autres, c’est le quotidien.
En nous plongeant dans nos données de réservations, nous avons identifié 84 personnes qui se sont rendues dans 20 pays ou plus au cours de l’année, et d’autres qui ont voyagé dans des dizaines, voire des centaines de villes avec Airbnb.
Certains profitent de lunes de miel prolongées ou d’années sabbatiques, tandis que d’autres sont des retraités qui savourent ce tour du monde tant attendu. Une bonne part d’entre eux appartient à ce qu’on appelle les « Digital Nomads », ces gens qui travaillent en voyage, trouvant l’inspiration à travers de nouveaux lieux et de nouvelles expériences.
Ces longs voyages sont de plus en plus prisés des voyageurs Airbnb : cette année, ils sont 27 % de plus que l’année dernière à avoir accumulé au moins 20 nouveaux tampons sur leur passeport.
Nous avons discuté avec trois voyageurs au long cours pour découvrir ce qui les a poussés à partir sans billet de retour et comment ils parviennent à s’épanouir sans adresse permanente.
Rachman Blake | Écrivain et comédien | Actuellement à Mumbai en Inde
Tout a commencé par une rupture. C’est l’une des raisons qui m’a fait plonger dans le stand-up. L’humour est devenu une sorte de thérapie pour moi. Aux côtés d’autres comédiens, j’ai commencé un spectacle sur la vie de couple : les bons côtés, les mauvais côtés et les côtés comiques des relations amoureuses à notre époque.
Nous sommes partis sur les routes pendant près d’un an et on s’est dit qu’il fallait produire le spectacle partout pour qu’il marche. On a utilisé les publicités Facebook pour évaluer l’intérêt suscité par notre spectacle et on a réalisé que plein de gens étaient prêts à venir le voir dans toutes les grandes villes.
On est allés en Roumanie, puis dans un nouveau pays chaque semaine : c’est l’un des côtés géniaux de l’Europe. Après trois mois de succès, nous avons décidé d’emmener notre spectacle en tournée mondiale.
On essaie toujours de réserver un logement proche de la salle. Et le plus simple, c’est avec Airbnb. On se concentre juste sur le spectacle et on ne perd pas de temps à chercher là où dormir.
Ce que j’apprécie vraiment, c’est de me remettre en question chaque jour, d’apprendre à quoi ressemblent les relations amoureuses dans la culture locale, et de mettre en place un spectacle qui fonctionne dans une culture qui ne partage pas toujours les mêmes valeurs. On travaille aussi avec des comédiens locaux, qui peuvent parler de la vie de couple avec un autre regard.
J’ai discuté avec des hôtes Airbnb de la culture locale, et leurs points de vue nous aident à rendre le spectacle plus universel. Au final, ces échanges ont fait de nous de meilleurs comédiens, à la fois plus polyvalents et accomplis.
Nous avons tourné dans plus de 20 villes, et on devrait être pas loin des 60 villes l’année prochaine. Ça nous a ouvert les yeux sur les différences culturelles en matière de relations amoureuses. Les histoires d’horreur n’ont rien à voir, mais dans tous les pays visités, le constat est le même : les relations amoureuses, c’est la loose.
Ellany Lea | Psychothérapeute et coach | Actuellement à Madrid en Espagne
Mes parents sont Taiwanais, mais je suis née et j’ai grandi au Canada. J’ai commencé à voyager sur le tard, je n’ai pas été élevée sur un bateau de croisière, mes parents n’étaient pas diplomates. J’étais l’aînée de la famille et c’était ma responsabilité de m’occuper de mes frères et de mes parents. La famille, c’est sacré : les intérêts de tout le monde passent avant les tiens. Quand mon père est parti à la retraite, j’ai fait venir mes parents à Vancouver. Je me suis dit alors : « Mon père est retraité, mes frères sont grands, il est temps de partir en voyage ».
À la base, je suis diplômée en génie électrique, mais je voulais partir à l’étranger. Pour me rendre utile aux gens. Je suis donc allée au Rwanda et j’ai attrapé le virus du voyage : vous rencontrez des inconnus qui vous accueillent et avec qui vous nouez des liens. Pendant cette mission, j’ai hébergé beaucoup de stagiaires chez moi. Mon appartement, c’était un peu comme Airbnb avant l’heure.
De fil en aiguille, j’ai fini par travailler pour Médecins sans frontières à New York. J’étais leur expert en stratégie en ligne internationale. Ce qui m’a amené à l’apprentissage du leadership : j’ai reçu une formation et une certification de coach puis de psychothérapeute.
J’ai commencé par le Nicaragua en 2010, et je recevais mes appels là-bas. Je n’étais pas sûre que ça marcherait alors j’ai fait le test avec un client pour me rendre compte que je pouvais prendre des appels n’importe où. L’année suivante, je me suis rendue dans trois pays : la France, l’Italie et la Grèce. L’année d’après, dans 5 ou 6 pays. Puis dans 16 pays l’année suivante.
Ça m’a appris à devenir zen. Et pourtant, je suis quelqu’un de très organisé. Mes vols sont le lundi, je choisis toujours d’atterrir à la mi-journée pour avoir le temps d’aller faire quelques courses et m’installer. Le mardi, je me promène, et le mercredi et le jeudi je passe mes appels pour mes séances de coaching. Enfin, le vendredi, le samedi et le dimanche, je suis libre d’aller camper dans le désert, de plonger en mer ou de partir pour d’autres aventures. Même si ça peut paraître surprenant, j’ai besoin de structures pour m’épanouir.
Si j’avais monté mon cabinet au Canada, je n’aurais pas de raison de prendre les choses avec autant de zen. Parce que je dois sans cesse faire face à des événements comme des retards d’avion ou la négociation du prix des taxis. J’ai vécu ces situations et maintenant je sais comment les gérer.
Quand on dépasse les 80 pays, on commence à réaliser que le monde est minuscule et qu’on se ressemble tous. Lorsque j’ai franchi le cap des 50 pays, je me suis dit : « Pourquoi ne pas tous les visiter ? ». Je me pose quelque part pendant un ou deux mois, je me plonge dans le travail, puis je pars faire un saut dans quelques pays. La semaine prochaine, direction la Tunisie et Malte, soit les pays numéro 105 et 106. Je pense que j’aurai visité tous les pays ces deux prochaines années, et je suis sûre que je continuerai à voyager après. Je suis tellement habituée à cette vie nomade maintenant que je n’imagine pas rester très longtemps au même endroit.
Damon et Melissa Maria | Développeur logiciel et sage-femme | Actuellement à Prague en République Tchèque
Melissa : J’étais en Nouvelle-Zélande en train de rénover la maison, à me demander s’il fallait la mettre en vente quand Damon a suggéré que nous partions en voyage ensemble. On a commencé à l’autre bout du monde, à Hawaï, pour rendre visite à des amis, avant d’aller à Buffalo, dans l’État de New York. Après, on est montés jusqu’au Canada pour ensuite redescendre à travers le Mexique et l’Amérique centrale. J’y ai travaillé avec des sages-femmes mayas et j’ai également formé des étudiantes. Puis ils ont eu besoin de quelqu’un à Bali pendant quelques mois.
À ce moment-là, j’étais enceinte de 13 semaines et on a dû rentrer en Nouvelle-Zélande pour quelque temps. Quand notre fils Marlowe a eu 5 mois, on a repris la route. Lorsque la décision de partir a été prise, on a vendu tout ce qu’on possédait et qui ne rentrait pas dans un petit sac à dos. On savait qu’on partait pour une longue période.
Damon : Je suis développeur logiciel. Environ un an avant notre départ, nous avons créé une start-up à trois. Je m’occupe du développement et je gère l’équipe en Nouvelle-Zélande.
Melissa : Quand on a pris la route, mon objectif était de rencontrer des sages-femmes partout où nous allions, pour en apprendre plus sur la profession afin de l’exercer à un niveau global, sur tous les plans : sensibilisation, politique ou éducation. En octobre, je travaillerai dans un camp de réfugiés pour une association de sages-femmes. Et si tout se passe bien, c’est quelque chose que j’aimerais reproduire dans des endroits comme l’Irak, le Kurdistan et la Grèce. C’est une façon de continuer à être impliquée dans le milieu obstétrique en dehors du cadre clinique.
Maintenant que nous avons un enfant, nous voyageons de façon plus réfléchie. Et avec l’expérience, on sait d’avance ce qui va fonctionner ou pas.
Partout où on va, on essaie de rester au moins deux semaines dans nos logements Airbnb. Là, notre idée n’est pas de tout voir à Prague, sinon on ne ferait le voyage que dans ce seul but. Ce qu’on veut, c’est plutôt apprendre à bien connaître notre quartier. Le souvenir qu’on en gardera, ce sera peut-être celui d’un petit café sympathique. C’est ce qui nous plaît avec Airbnb : fréquenter les habitants de la ville.
Damon : On essaie de se voir comme des citoyens du monde. Voyager en permanence nous oblige à sortir de notre zone de confort, à nous frotter à l’inconnu. Nous voyageons également avec très peu, ce qui prouve qu’on n’a besoin de rien de plus.